67 - Katya Bonnenfant et Kota Ezawa, Le Rio Grande, 502 et 503 roads, la Terre des Tamayame, Sandia Mountain avec Jean-Pierre

Nous partageons la table du petit déjeuner avec un jeune couple. Ils parlent Anglais, tous les deux avec un accent, français il nous semble pour elle et plutôt allemand pour lui. Au bout d'un temps, elle se tourne vers nous: "Mais vous parlez Français", "Nous sommes français comme vous, non?" Ils sont tous les deux artistes, elle habite Lyon, lui San Francisco et il est moitié japonais, moitié allemand. Ils se sont rencontrés pendant une résidence en Allemagne. Ils sont peintres, mais écrivent aussi et utilisent la vidéo. On sympathise, on discute.

Pour vous les présenter,ces films sur tous les deux, Odessa Staircase Reduxpuis Katya Bonnenfant etKota Esawa.Le très haut pont sur le Rio Grande, on descend dans les gorges, longe la rivière jusqu'à Pilar, en s'arrêtant de temps en temps pour montrer à Jean-Pierre les endroits que j'ai préférés.On prend la haute route de Taos qui passe par Las Trampas et Truchas. La neige tombe à nouveau. Des averses brusques. Le soleil qui perce parfois, la lumière devient étonnante. Jean-Pierre décide de continuer par des petites routes jusqu'à l'hôtel où nous passerons la nuit, la 503 puis la 502. Nous passons dans des terres retirées, hameaux qui paraissent désertés, pourtant des voitures sont garées devant les maisons, prairies, vaches, sierras, canyons, le gris vert de la sauge, les bruns pâles ou sombres, les ocres et les roses des terres, blanc neigeux des sommets, rouge éteint, bleu pâle, mauve, jaune assourdi des maisons, les corrals souvent délabrés, les barbelés, eux bien entretenus, aux limites des réserves, le ruban étincelant d'un rio traversé ou longé un temps.C'est ce mélange de signes d'un passé de pionniers et d'une présence humaine pourtant imperceptible, si on peut dire, de terres à l'infini, qui paraissent inchangées, qui me plaît ici. L'impression que la dureté et la rudesse constituent ce pays tout autant que la beauté des ciels, sans cesse changeants, et des paysages effarants de variété. Rien n'est pittoresque, trop banal, trop particulier, trop laid ou trop beau. Oui finalement l'excès en tout comme dans cette manière américaine de s'exprimer, enthousiasme d'autant plus excessif qu'il ne connaît pas la fatigue d'une longue histoire, peut-être?.Ciel gris brusquement déchiré par le soleil en train de descendre à l'horizon pour arriver à l'hôtel situé sur la terre des Tamayame, près de Santa Anna pueblo. A l'est la pleine lune au-dessus de la ligne des arbres roussis par le soleil couchant pour adoucir notre dernière promenade? Jean Pierre repart demain. La rivière derrière...